Le pouvoir du cinéma ?
Un film peut se saisir de la réalité, la réécrire, la présenter sur une certaine forme narrative et même la signer d’une esthétique particulière et pourtant, toujours prétendre transmettre le « réel ». Pour Nicole Brenez, historienne et théoricienne du cinéma, « tel fut peut-être le génie du cinéma : à la manière dont on entretient une flamme, cinéastes, critiques, essayistes, théoriciens ont entretenu la croyance que, en tant qu'activité symbolique, le cinéma pouvait tout - enregistrer, conserver, décrire, expliquer, annoncer, prévoir, exprimer, figurer, enchanter, ouvrir, changer, sauver le monde » (5). Cela s’avère, bien sûr, excessif. Mais pourtant, on a envie d’y croire. L’histoire du cinéma politique et militant nous montre que des artistes interpelés par la réalité, considèrent le cinéma comme une arme capable de représenter le réel, mais aussi comme un outil pour sa transformation. Ce fut le cas des groupes Medvedkine français des années 1967-1973, ou du « cinéma-guérilla » de Fernando Solana et d’Octavio Getino, en Argentine.
Mais si le cinéma n’est pas capable de tout transformer ou de tout enregistrer, peut-il au moins façonner des faits et les inscrire dans l’imaginaire populaire ? Peut-il changer une opinion, la perception des événements, voire d’une partie de l’Histoire ? Et s’il arrive à le faire, à travers quels mécanismes ?
Pour Brenez créer une image c'est « s'attribuer une parcelle de pouvoir symbolique » (4), un espace où on serait capable de reconstituer les sujets et les problématiques qui nous intéressent et de les exprimer selon notre propre vision du monde. Quand on parle donc du cinéma politique, on ne parle pas d’un genre, mais de films qui mettent en scène la politique (Barot 13) et qu’il faut comprendre dans la singularité du combat social et politique (12), depuis « l’intérieur » du film. C’est pourquoi Emmanuel Barot, chercheur en philosophie des sciences et en théorie politique, propose de parler plutôt de « formes politiques du cinéma »[1], comprenant par-là qu’un film politique, « par son procès de production comme film, par ses contenus, et par les formes artistiques mobilisées, livre une version, une lecture, bref, une interprétation du sens d’un combat, et plus profondément, propose même une formulation de ce qu’est un combat, et des conditions qui l’exigent » (Barot 13).
Considérées sous cet angle, les réponses à nos questions ne pourront être que partiales et singulières. L’exemple étudié sera celui du film Yawar Mallku (Le sang du condor, en langue aymara, 1969), du réalisateur bolivien Jorge Sanjinés (La Paz, 1937) et du groupe Ukamau[2]. Le choix de ce film tient à plusieurs raisons, dont la plus évidente est la répercussion du film dans la politique de la Bolivie des années 60, mais également à cause de la réflexion du réalisateur autour du « réel » et du film comme opérateur politique, lui permettant de véhiculer un discours critique de l’histoire politique et culturelle de la Bolivie avec une manière très codifiée de faire du cinéma. En soixante ans de carrière, Sanjinés réalise treize longs métrages, dont le tout dernier sortira en 2022.
L’exploration de cette problématique commencera avec un bref résumé de l’histoire de la Bolivie, afin de mieux situer les positions idéologiques existant à l’époque de la sortie du film. Nous évoquerons ensuite la fabrication du film, que Jorge Sanjinés présente et proclame comme celle d’un projet horizontal, avant d’étudier la réception du film à travers les informations et les débats diffusés par les médias écrits. Il s’agira enfin d’évaluer l’expérience de ce film à la lumière de la théorie et de la pratique du cinéma politique, engagé ou militant.
Une nation clandestine
Le pays qu’on connaît actuellement comme la Bolivie faisait partie intégrante de l’Empire Inca. Mais il a été aussi le foyer de diverses cultures comme les Aymaras ou les Guaranis, ainsi que de dizaines d’autres peuples, qui se sont développés, battus ou rassemblés jusqu’à la fracture qu’a représentée l’arrivée des Espagnols sur leur territoire au début du XVIème siècle. Il est important de souligner cette origine, car cela explique la généalogie des identités culturelles boliviennes actuelles, déterminante pour l’évolution politique de cette région.
La colonisation espagnole, longue de trois siècles, représente en premier lieu pour ces peuples une extermination de masse, ensuite une perte de droits sur leurs territoires, une réduction de leurs coutumes et pratiques culturelles, ainsi que l’endoctrinement dans une religion et une vision du monde divergentes des leurs. Cela signifie également l’implantation d’entités géopolitiques arbitraires : les vice-royaumes, audiencias et capitanías. Ce sont de grandes divisions territoriales conçues comme des entités représentant l’administration militaire et fiscale de la couronne espagnole sur les territoires de ce « nouveau monde ». Bien entendu, ces nouvelles frontières n’ont aucune relation avec l’occupation territoriale précoloniale des peuples natifs.
A travers le repartimiento et l’éncomienda, la colonie consolide également une structure sociale. Le repartimiento consiste en la répartition des terres de l’Inca, d’abord entre les conquistadors et ensuite entre les nouveaux colons espagnols. Par l’encomienda un colon pouvait bénéficier du travail d’un certain nombre de natifs en échange de leur éducation chrétienne (Fisbach 27). Le sommet de la pyramide sociale coloniale est donc occupé par les personnes nées en Espagne, suivies par leurs descendants en ligne directe et sans mélange ethnique, les criollos, qui ont moins de pouvoir et de responsabilités dans la structure coloniale. Ensuite les métis qui, selon le type de mélange, peuvent aspirer à certains métiers valorisants. Enfin les peuples natifs, aux droits très restreints et les esclaves noirs, sans aucun droit que ce soit.
Au début du XIXème siècle, résultant de tensions entre les Espagnols et les criollos, qui réclament un traitement plus égalitaire, éclatent les Guerres d’Indépendance. Après une vingtaine d’années de conflit, naissent plusieurs républiques, qui intègrent divers propos humanistes, démocratiques et égalitaires à leurs constitutions, inspirées de la Révolution Française et de la Constitution des États-Unis (Sandoval Rodríguez 185). Cependant, dans la pratique, ces sociétés gardent la même pyramide sociale, si ce n’est que les criollos occupent maintenant le pouvoir (176).
Pour les peuples natifs, la naissance de la République bolivienne aboutit à une deuxième colonisation. Leurs frontières traditionnelles précoloniales sont une fois de plus ignorées, ainsi que leurs identités culturelles ou leurs organisations politiques. Aucun représentant des peuples natifs n’est invité à signer la Déclaration d’indépendance de la Bolivie du 6 août 1825 (Fisbach 35).
Les nouveaux gouvernements latino-américains, en pleine construction des identités nationales, parleront du « problème indien », une périphrase pour évoquer la nécessité, de la part des nouvelles élites blanches, d’établir une réponse politique face à la présence de populations natives dans « leurs » territoires.
En Bolivie, la solution au « problème indien » a été de les soumettre à une sorte de nouvel esclavage. Selon Chiavennato, chercheur brésilien, au début de sa vie républicaine, l’actuel territoire de la Bolivie comptait environ onze milles communautés de natifs, gardant leurs territoires et un certain degré d’autonomie. En 1930, elles n’étaient plus que cinq cents deux (Chiavenato 1989, 26). Le reste des territoires avait été réparti par l’État au cours du XIXème siècle entre quelques grands propriétaires fonciers, avec le droit de gouverner et même de vendre les natifs vivant à l’intérieur de leurs terres. Dépourvus du droit à l’éducation, à la santé ou à l’action politique, des millions de personnes restaient condamnées au silence, à la violence et à l’impunité. La Bolivie n’était pas une nation, mais un territoire propriété de quelques familles (Fisbach 36).
En 1952 éclate une violente révolution contre ces injustices. Éliminés (en partie) les grands propriétaires fonciers, le pays se concentre sur la construction d’une nouvelle bourgeoisie, la nationalisation des ressources minières, la distribution de la terre et une nouvelle réforme éducative inclusive. Ce sont des projets qui ont fait couler beaucoup d’encre et du sang et dont les résultats sont assez contestables. En termes de pyramide sociale, le résultat restait le même, les descendants d’Européens et les métis s’emparaient une nouvelle fois du pouvoir, laissant toujours les natifs en bas de l’échelle. Avec certes davantage de droits en théorie mais en pratique, pas beaucoup plus que précédemment.
Presque vingt ans après cette révolution, un jeune réalisateur qui prépare son deuxième long métrage entend parler d’une histoire difficile à croire : le programme de stérilisation sans consentement des femmes quechuas en Bolivie, mené par les Corps de la Paix envoyés par le gouvernement de John F. Kennedy (Sánchez-H 83). Le Corps de la Paix (Peace Corps en anglais) est une agence indépendante du gouvernement américain, dont « la mission est de favoriser la paix et l'amitié dans le monde, en particulier auprès des pays en développement[3] », selon son site officiel.
Le sang du condor
En première instance, Jorge Sanjinés veut réaliser un documentaire avec les victimes à Watajata, village d’où est partie la dénonciation. Cependant, personne ne veut prendre le risque de témoigner devant les caméras (Salmon 19). C’est une réaction courante sous la dictature du général René Barrientos, allié inconditionnel des États-Unis. C’est lui qui est à l’origine de la persécution et de l’exécution de Che Guevara en 1967. Sanjinés décide donc de faire une fiction.
En 1968, Jorge Sanjinés et une petite équipe de cinéma constituée de neuf personnes, partent vers le village quechua de Kaata, à 400 kilomètres de la ville de La Paz. Ils comptent avec un scénario et un contact dans la région, Marcelino Yanahuaya, l’autorité traditionnelle du lieu. Le voyage dans cette région n’est pas facile. Ils doivent faire les 15 derniers kilomètres à pied, en utilisant des mules pour transporter le matériel cinématographique (Jorge Sanjinés 1980, 26).
A Kaata, la population locale se méfie immédiatement de l’équipe de cinéma. Yanahuaya est enthousiaste à propos du film, mais il est le seul. Cette attitude souligne un élément important dans les relations interculturelles boliviennes : la méfiance chronique envers l’altérité. Sanjinés et son équipe technique et artistique, proviennent d’un monde qui a toujours été hostile aux natifs. Leurs barbes et leur technologie évoquent chez les natifs d’autres rencontres aux conséquences systématiquement funestes.
La méfiance va se transformer en agressivité et le groupe de cinéastes, accusés d’être de communistes dangereux, est contraint de partir sous la menace d’un lynchage. Cependant, Marcelino Yanahuaya arrive à convaincre à la communauté de faire passer aux cinéastes l’épreuve ultime du jaiwaco, tradition ancestrale consistant à lire les vérités cachées de ce monde dans les feuilles de coca. C’est donc un Yatiri (« celui qui sait » en aymara, guide spirituel) qui va lancer les feuilles de coca et rassurer sur les bonnes intentions des cinéastes. L’épreuve surmontée, la communauté accepte de participer au tournage.
Selon Sanjinés, la faute initiale commise par l’équipe de tournage est d'avoir approché la communauté sans connaître son fonctionnement. Ils supposent qu’avoir le seul consentement du chef est suffisant pour exécuter leur mission, sans se rendre compte que dans les communautés quechuas et aymaras toutes les décisions importantes se discutent et s’approuvent en assemblée générale (1980, 26‑31).
Suite à ce premier imbroglio, le tournage se passe sans revers majeurs, mais en grand secret. Sanjinés incorpore la cérémonie de jaiwaco dans le film et Marcelino Yanahuaya joue le rôle d’Ignacio Mallku, le chef de la communauté.
Le film commence en montrant une condition inexplicable au sein de ce village quechua : les femmes ont perdu la capacité d’engendrer. C’est le cas d’un jeune couple : Paulina (Benedicta Mendoza) et Ignacio Mallku (Marcelino Yanahuaya). Par la voie des séquences en flashback, nous assistons à l’arrivée d’une équipe médicale, appartenant aux Corps de la Paix américains, distribuant des vêtements Made in USA pour gagner la confiance des natifs. Ensuite, les étasuniens installeront divers bâtiments près des communautés quechuas, dont une clinique consacrée à la santé maternelle. C’est précisément à cet endroit qu’ils s’occupent de la stérilisation des femmes sans jamais demander leur consentement.
Figure 1 - Affiche Officielle du film Yawar Mallku (1969)
Dans un acte de l'ordre de la justice communautaire, les quechuas châtrent les médecins étasuniens. C’est Ignacio qui dirige cette action avant d’être gravement blessé lors d’une confrontation avec la police. Sa femme, Paulina, l'emmène dans un hôpital de la ville de La Paz et sollicite l'aide du frère d’Ignacio, Sixto (Vicente Verneros), qui travaille dans une usine. Sixto habite à la ville depuis des années, il ne s’habille plus comme son frère, il parle espagnol, cherche à s’adapter au mieux à la culture dominante et, surtout, refuse catégoriquement de se considérer comme un « indien ».
Pour sauver la vie de son frère, Sixto doit trouver de l’argent afin d’acheter du sang pour une transfusion. La mise en scène de ces efforts infructueux constitue la moitié du film. Sixto se confronte à l'indifférence des élites blanches à l’égard de la souffrance des majorités indigènes. Le film dénonce le racisme systémique, manifeste également dans les actions du personnel de la santé publique. Enfin, Ignacio décède abandonné par une société qui le méprise complètement.
Le film se termine par le retour de Sixto à sa communauté. Témoin des conséquences des actions des Corps de la Paix, de l’impunité de la police, du racisme des citadins, ainsi que du mépris pour la vie des siens, il revient à ses origines. Sixto change sa tenue occidentale pour les vêtements traditionnels de sa communauté, comme un symbole de son retour aux racines. Lui, qui au début du film représentait l’aliénation culturelle, se transforme en symbole de résistance.
Figure 2 - Photogramme séquence finale du film (Jorge Sanjinés 1969)
La séquence finale prône une des idées clés du cinéma révolutionnaire de Jorge Sanjinés : La substitution du héros individuel du cinéma occidental par un héros « populaire, quantitatif et nombreux » (1980, 61), capable de dépasser son rôle de personnage du film, pour participer qualitativement à la création cinématographique. La communauté de Kaata se transforme en personnage collectif, dont les différents membres jouent leur propre rôle, se manifestant à travers leur vision du monde, leur langue et leurs traditions.
Sixto revient donc réintégrer cette entité organique. A la fin du film, il défie la caméra, son identité indigène retrouvée, lançant un appel à la lutte. Ensuite, plusieurs bras se lèvent pointant des fusils vers le ciel, renforçant l’idée d’une résistance collective.
Le retour à une culture originelle s’inscrit comme une riposte au syncrétisme culturel des villes boliviennes. Pour Sanjinés, celui-ci est une prolongation de la colonisation espagnole, de la colonisation républicaine, mais aussi de l’impérialisme américain, ayant tous trois les mêmes objectifs : la disparition de l’esprit des peuples natifs, à travers l’aliénation ainsi que leur disparition physique, à travers le nettoyage ethnique, l’esclavage ou la stérilisation. C’est un sujet présent dans plusieurs films de Sanjinés, notamment La Nación Clandestina (La Nation Clandestine, 1989).
Sanjinés décrit Yawar Mallku comme son premier film anticapitaliste (1980, 95) et le point de départ de la consolidation de sa vision politique du cinéma, donc « une interprétation du sens du combat », comme l’avance Barot (13). Sanjinés nous présente un cadre où les différentes formes d'exploitation et d'oppression sont le résultat du colonialisme historique ainsi que des stratégies du néocolonialisme des Etats-Unis. A partir de Yawar Mallku, il commence à comprendre les possibilités d’un film comme moyen de création des évènements dans l’imaginaire populaire. Comme il l’admet lui-même, ce film est conçu d’abord comme un défi narratif et technique par son équipe de tournage, dans une logique de production occidentale. Cependant, cela se transforme en un débat sur la capacité de ce film à :
- Laisser de côté la méthodologie de tournage pyramidale au profit d’une manière de procéder accordée à la gouvernance collective quechua (Jorge Sanjinés 1980, 30).
- Comprendre la différence entre sa conception initiale du cinéma en général et le cinéma capable de décrire, d’une manière implicite, la vision du monde de ce peuple (Jorge Sanjinés 1980, 32).
- Aller au-delà de la dénonciation afin d’éclairer les raisons historiques des faits dénoncés (Jorge Sanjinés 1980, 92).
Sanjinés veut donc passer d’un discours sur l’histoire politique des peuples natifs à un discours à l’intérieur de cette histoire, utilisant le cinéma comme opérateur politique.
Les répercussions : diffusion et réception du film.
En 1969, le film est prêt pour sa diffusion en salle. En raison de son caractère dénonciateur, le gouvernement du nouveau président, Adolfo Siles Salinas, allié inconditionnel des États-Unis, censure le film quelques heures avant sa présentation officielle. Le 17 juillet, l’accès à salle du cinéma 16 de Julio est barricadé pour empêcher le public d’accéder à la première. Environ cinq cent personnes sont déjà réunies devant le théâtre pour acheter des billets quand elles apprennent que les autorités annulent la projection (Presencia 1969). La foule, furieuse, se manifeste et se confronte aux canons à eau de la police (Sánchez-H 73 et 84). Face à ces manifestations et à la réaction hostile des journalistes, les autorités annulent leur décision quelques heures plus tard (Gumucio Dagrón 232).
Au niveau international, Yawar Mallku reçoit plusieurs distinctions : le Timone d’oro au Festival International de Venise en 1969, le Gran Premio Espiga de Oro à Valladolid ou le prix Georges Sadoul en France, entre autres. En 1970, Yawar Mallku est ainsi diffusé dans plusieurs festivals, ainsi qu’auprès d’universités, de syndicats, etc. En Bolivie, Sanjinés calcule que le film aurait touché un large public, cumulant pas loin de 250 000 entrées (1980, 69).
Le succès du film et son écho médiatique obligent à l’État bolivien à ouvrir une enquête judiciaire pour vérifier les faits dénoncés. La présence et les actions des Corps de la Paix en Bolivie vont être mises en cause et cet organisme est finalement expulsé de Bolivie en 1971 (Jornada 1971).
Il serait facile de recourir à l’explication simpliste d’un film suffisamment virtuose, capable de provoquer un changement palpable de la réalité. Effectivement, le film a joué son rôle d’ « opérateur privilégié de cristallisation et d’analyse de contradictions qui animent les rapports sociaux et des façons dont les gens les subissent et/ou se les réapproprient », auquel fait référence Barot quand il parle du cinéma politique (12). Cependant, c’est l’adhésion de l’action politique organisée et les médias, avec leurs moyens d’installer le débat dans la société civile, qui jouent un poids déterminant dans cette histoire.
Pour rappel, la Bolivie des années 70 est un pays où il ne serait pas étonnant de trouver des gens en accord avec les actions des Corps de la Paix. Au moment de la découverte de cette histoire par Sanjinés (1968), quelques médias locaux avaient déjà dénoncé les faits, sans que pour autant la société civile se mobilise (Gumucio Dagrón 229).
Dans ce cas, quel changement apporte le film ? On peut avancer qu’avec Yawar Mallku, Sanjinés arrive à inscrire un « événement » dans l’industrie de la communication. Pour Nicole Brenez, un événement « consiste en la prise en charge subjective et sociale du “fait”, il équivaut à la façon dont celui-ci se met à résonner dans l’intellection et la conscience, singulière ou collective » (Brenez 19). Tout en sachant que le « fait » relève « d’une concrétion de croyances à laquelle nous adhérons provisoirement » (Brenez 19). C’est donc une affaire idéologique et le cas de la stérilisation des femmes indigènes en est un exemple clair. Quand il s’agit d’une dénonciation émanant de quelques radios communautaires indigènes ou de quelques lignes dans un journal, cela n’intéresse personne. C’est un « fait » dont la véracité ne peut même pas être prise au sérieux, parce qu’il provient de la population native qui à cette époque, ne possède encore aucun poids social ou politique. Cependant, une fois que le « fait » se transforme en événement médiatique national et international, les classes moyennes et le gouvernement boliviens sont obligés de regarder le film, de débattre du sujet et de prendre des mesures concrètes. Je souligne : regarder le film, pas forcément les femmes victimes de ces actes. Car une partie du public citadin (pour ou contre ces « faits ») ne voit pas la population native comme des citoyens victimes d’un attentat aux droits humains. Elle voit ce « fait » plutôt comme une profanation de la « patrie », de la « nation », c’est-à-dire, du territoire dont elle se croit propriétaire. Plusieurs exemples seront exposés plus loin.
Comme le rappelle Barot, le cinéma politique cherche à provoquer chez le spectateur, un effort d’analyse, à « produire chez lui du trouble plus que de l’empathie » (14). Mais, comment transformer un ressenti personnel en indignation collective ? Il n’existe probablement pas une réponse unique, mais plusieurs variables à prendre en compte.
D’une part, l’organisation d’un réseau militant autour du film. Depuis son premier long-métrage, Ukamau, (« C’est ainsi », en langue aymara, 1967) et inspirés par le « ciné-train » d’Alexandre Medvedkine, Sanjinés et le groupe Ukamau parcourent plusieurs communautés indigènes, des universités, ainsi que des centres ouvriers et miniers pour montrer leur premier film (Jorge Sanjinés 1980, 69‑70). La séance de cinéma est toujours accompagnée d’une présentation des objectifs du groupe, mise en contact avec les dirigeants ainsi que d’un débat ouvert au public. En 1969 Sanjinés et le groupe Ukamau bénéficient déjà d’une certaine réputation dans les cercles de gauche.
Ce sont précisément cette réputation et ces contacts qui ont joué contre la censure du gouvernement. Aujourd’hui, nous savons que malgré une note officielle de l’organisme de censure de l’époque ordonnant l’annulation de la première du film, Sanjinés et Oscar Soria (directeur de la photographie) décident de maintenir la projection. Afin d’éviter une possible intervention de la part du gouvernement, ils alertent leur réseau universitaire, journalistique et intellectuel. Faisant appel aux groupes d’étudiants universitaires de La Paz et d’Oruro, ils organisent un plan de contre-attaque : assistance en masse devant la salle de cinéma et appel à la résistance immédiate à tout blocage (Sánchez-H 73). Cette stratégie provoque une adhésion spontanée d’une partie de la population qui marche avec les étudiants pour manifester sur la place principale de La Paz et face à l’ambassade américaine. Ces manifestations propulsent le film aux premières pages de plusieurs journaux.
Figure 3 - Foule réunie devant le théâtre "16 de Julio" face au panneau annonçant l'annulation de la projection. (« Prohibición Yawar Mallku » 1969)
D’autre part, une forte implantation de Yawar Mallku dans les médias. A titre d’exemple, le 17 juillet 1969, le jour même de la première du film à La Paz, avant que la censure ne soit établie, est publié un article signé par Luis Espinal (Espinal 1969) dans le journal Presencia. Espinal est un prêtre jésuite catalan, chercheur en cinéma, précurseur de la Cinémathèque bolivienne et fondateur de l’Assemblée Permanente des Droits Humains de la Bolivie. Il est aussi une figure très importante de la gauche bolivienne, ainsi que de la « théologie de la libération », un secteur progressiste de l’Église catholique latino-américaine. Compte-tenu du contenu positif de l’article et de la date de sa publication, plus qu’une critique cinématographique, il s’agit d’une invitation aux lecteurs à voir le film.
Espinal aborde rapidement la qualité principale du film : il est édifiant, capable de nous montrer la Bolivie dans un sens profond et contemporain. Yawar Mallku a donc la capacité de faire découvrir aux Boliviens des évènements de leur réalité. Le film se veut une source de renseignements fiables par rapport aux actions des Corps de la Paix américains dans les communautés quechuas. En conséquence, le film est une dénonciation qui nécessite forcément un jugement moral de la part du public et, ensuite, une réaction sociale. « Dans la Bolivie d’aujourd’hui, c’est le seul cinéma décent qu’on peut faire, si nous ne voulons pas tomber dans l’esthétisme inerte ou dans le commerce pur[4] » (Espinal).
Enfin, l’article d’Espinal est un appel à la défense de la Patrie : « si quelqu’un trouve que cela ne peut pas être dit en Bolivie, il faudra avouer que nous continuons à être des esclaves, et le 16 juillet 1809 restera un évènement complètement inutile », faisant allusion à la date à laquelle la ville de La Paz a déclaré son indépendance de l’Empire espagnol. Les universités vont réagir très rapidement pour soutenir la diffusion de Yawar Mallku et demander l’élucidation des faits dénoncés. Ils vont également envoyer des notes aux journaux de La Paz et de Cochabamba pour rendre publique leur protestation.
Dans une note intitulée « Interdiction à Yawar Mallku : Un crime contre la culture », publiée le 20 juillet 1969, la Confédération Universitaire Bolivienne et la Fédération Universitaire Locale de Cochabamba, laissent éclater leur indignation : « L’anti-culture s’est manifestée dans un évènement qui doit provoquer la honte des locaux et des étrangers ; l’attentat a été consumé et le pays se trouve piégé dans les affaires ignorantes d’une ‘Censure’ qui préfère interdire une production nationale qui, dans le cas qui nous occupe, est le véhicule vers la connaissance de la réalité bolivienne[5] ».
Les universitaires de La Paz lancent des propos similaires contre les autorités nationales et dans un manifeste publié dans le journal Hoy, en août 1969, ils appelleront au soutien massif des projections de Yawar Mallku (Gamboa 153). Simultanément, une lettre ouverte est publiée dans le même journal et signée par 171 intellectuels, artistes, universitaires et autres citoyens, qui manifestent pour la défense du droit à la libre expression. La lettre exige des censeurs une explication publique des motifs de l’interdiction de Yawar Mallku, une action que les auteurs considèrent comme antinationale et colonialiste (Gamboa 153-154).
Malgré toutes ces manifestations de soutien à Yawar Mallku lors de cette polémique, s’élèvent aussi des voix discordantes. C’est le cas d’un article d’opinion signé par Jorge Peña, dans le journal Prensa Libre de la ville de Cochabamba, le 27 juillet 1969. A l’inverse des autres articles cités, celui-ci fustige le film. Il commence par s’en moquer, en disant qu’un tel titre (Le sang du condor) avait des consonances tragiques et culinaires à la fois (Peña 1969). Peña considère le film comme douteux dans sa dénonciation contre les étasuniens et facteur de convulsions sociales. Tout cela pour minimiser, voire soutenir, la motion de censure imposée par les autorités de la municipalité de La Paz. Pour lui, il est anormal que la censure d’un film provoque une telle réponse de la part de la société civile. C’est donc une réaction exacerbée et violente, dont les coupables peuvent être facilement identifiables : « les universitaires qui ne perdent pas une occasion pour acclamer le Che Guevara [...], les glorieuses filles en minijupe qui ont demandé la démission du Maire [...][6] » (Peña). L’auteur se demande si la polémique générée par le film pouvait amener la société bolivienne à une confrontation armée aussi ridicule que celle entre le Salvador et le Honduras, conflit qui éclate à la suite d’un match de football entre les sélections de ces deux pays[7].
Ce n’est pas le seul écrit paru à l’époque pour critiquer Yawar Mallku. Dans un article publié dans le journal Hoy, fin août 1969, intitulé « Cinématographie indigène, démagogie internationale », un auteur anonyme réagit négativement au prix obtenu par Yawar Mallku au Festival de Venise. En cause, les propos de Jorge Sanjinés au moment de la remise du prix Timone d’Oro, affirmant que le but du gouvernement était « d’exterminer la race indigène à travers des méthodes physiques, spirituelles et psychologiques de stérilisation, imposées par les États-Unis» (Hoy).
L’auteur s’indigne des propos de Sanjinés, car ils dénigrent sa propre patrie à l’étranger. Ensuite, il affirme que les déclarations de Sanjinés correspondent à un état de « psychose politique », car dans un pays qui compte 80 % de personnes d’origine native, il est inimaginable de croire à un tel projet d’extermination (Hoy). C’est donc un propos absolument faux. Les attaques contre le gouvernement bolivien et tout ce que le réalisateur bolivien manifeste à l’heure de recevoir le prix sont, selon l’auteur, de l’ordre de la démagogie : « Tout cela nous démontre que M. Sanjinés est un apatride. C’est la seule façon de comprendre pourquoi il ne se fait pas le moindre souci à l’heure d’offenser, si crûment, la Bolivie et son gouvernement » (Hoy).
Face aux affirmations de Jorge Sanjinés à Venise, même le président de la République est obligé de répondre à la presse : « Vous pouvez constater qui possède un esprit plus ouvert entre l’opinion de M. Sanjinés et la mienne. Moi, je me réjouis de son triomphe » (Prensa libre), répond Luis Adolfo Siles Salinas, sur le ton de la conciliation. Alberto Bailey, directeur du journal Presencia, et président du Tribunal d’Honneur de l’Association de Journalistes de La Paz, écrit dans sa colonne La Carta del día (La lettre du jour), un article intitulé « Yawar Mallku et les rats ». Bailey se concentre sur la stérilisation des femmes sans leur consentement. Pour lui, c’est clairement une disposition qui est appliquée aux plus pauvres.
Bailey pense que la Bolivie, un pays si grand et si peu peuplé, ne nécessite pas de programme de contrôle de la natalité, mais plutôt l’instauration d’une structure sociale plus juste. Pour lui, Yawar Mallku touche le sujet avec réalisme et démontre le rejet que provoque la manipulation menée par les États-Unis dans les pays de l’Amérique Latine « comme si nous étions des animaux, pour qu’ils se permettent de nous déterminer et de nous ‘aider’[8] » (Gamboa 157). Pour Bailey, le message de Yawar Mallku est clair et profond et il est publié au moment précis de l’apparition de documents prouvant que les Corps de la Paix étaient en train de stériliser des femmes, paysannes et mineuses, dans différents endroits de la Bolivie.
Cependant, pour Alberto Bailey, le principal problème est autre : « le problème essentiel, basique, le numéro un : le manque d’une justice qui puisse éliminer le colonialisme interne, celui qui garde les grandes populations de l’Amérique Latine dans la condition de rats».
Mise en crise du réel
De toute évidence, Yawar Mallku et ses retombées dans la rue et dans les médias, provoquent une mise en crise de la réalité. Cela oblige le public des villes, les journalistes et surtout les responsables politiques à prendre position. Comme nous avons pu le constater, plusieurs débats fleurissent autour de cette œuvre : sur le nationalisme, sur le colonialisme, sur le racisme. Le film aboutit donc à positionner au centre de l’intérêt social son sens du réel pertinent, c’est-à-dire, celui que Sanjinés considère qu’on doit filmer. Car le réalisme, comme nous le rappelle Barot, est aussi une « affaire de positions dans et sur le monde, et non pas seulement affaire de restitution fidèle de ce qu’il ‘est’ » (20).
C’est là que se trouve une fracture, car le réel pertinent de Sanjinés est une vision du monde singulière et en transformation, qui s’inspire de la lutte et l’histoire des peuples natifs, qui milite pour leurs droits, mais qui participe malgré tout de l’hégémonie qui règne sur son pays. Car le cinéma, les médias, les responsables politiques, les prix internationaux, l’expulsion de Corps de la Paix et même ces lignes que nous sommes en train de lire, restent très éloignés de la réalité du village de Kaata.
Est-ce un vrai problème en termes cinématographiques ? En termes cinématographiques non, mais en termes politiques, probablement. Pour Sanjinés, Yawar Mallku est un film qui a plus de succès dans les théâtres commerciaux de Bolivie que son long métrage précédent, Ukamau (1966). Néanmoins, il demeure inaccessible aux paysans et aux mineurs, qui vivent là où il n'y a pas de théâtres, ainsi qu’aux habitants pauvres des bidonvilles, qui ne peuvent pas se permettre d’acheter des billets. Pour essayer de rendre Yawar Mallku plus accessible aux classes populaires boliviennes, Sanjinés et le groupe Ukamau amènent le cinéma directement aux gens, en organisant des projections dans les communautés minières affiliées à la Corporation minière de la Bolivie (COMIBOL).
L’intérêt des publics populaires pour ce film est moins important que prévu. Sanjinés se rend compte de deux problèmes principaux. Tout d'abord, Yawar Mallku montre aux publics populaires ce qu'ils savaient déjà (Sánchez-H 91). Inévitablement, dans la tentative de représenter la misère et l'oppression des natifs boliviens, le film leur montre quelque chose qu'ils connaissent beaucoup mieux que les cinéastes eux-mêmes. Ensuite, la forme narrative du film en soi laisse ce public particulier impassible (Salmon 22). L'accent narratif sur une seule famille (Paulina et Ignacio Mallku) attire la sympathie de la classe moyenne, mais il n’arrive pas à attirer le public d’origine native. Cela parce que dans les peuples natifs de la Bolivie, on se pense d’abord en tant que collectif et ensuite seulement en tant qu’individu.
Si l’on se prête à l’exercice de se pencher sur le film pour y trouver le combat social et politique, ainsi que le propose Barot, émerge une vision singulière (celle de Sanjinés) qui définit un conflit (celui de la stérilisation sans consentement) et qui le généralise comme le combat d’un peuple (les natifs, en première instance, ensuite les universitaires, les intellectuels, les artistes, bref, ceux qui entrent dans la catégorie du « peuple », pour Sanjinés).
Sanjinés utilise le cinéma pour souligner la confrontation entre un « héros populaire et collectif » et le néocolonialisme, tout en ayant des difficultés à intéresser réellement les peuples natifs, qui sont à la fois son personnage principal et son public cible. Ils sont très actifs politiquement à travers leurs syndicats, leurs organisations collectives traditionnelles, leurs radios communautaires, mais pas à travers le cinéma de Sanjinés et le groupe Ukamau.
Ce film est donc un exemple de ce que Javier Sanjinés, professeur bolivien de littérature latino-américaine à l’université de Michigan, décrit comme le conflit fondamental au cœur de la Bolivie moderne : le colonialisme irrésolu vécu par la majorité indigène et la tentative de construire un État national préconisé par les criollos et l'élite métisse (Javier Sanjinés 2004, 23). Un conflit qui perdure jusqu’à nos jours et qui est présent également dans le travail de nouveaux cinéastes boliviens[9], d'une manière implicite ou explicite.
Quand Yawar Mallku vient au public natif, Sanjinés et le groupe Ukamau cherchent des moyens pour réduire la fracture. A titre d’exemple, ils coupent des séquences du film jugées trop étrangères à la vision du monde des peuples natifs (Gupta 12). Ils fournissent également un narrateur qui raconte l'histoire du film avant le début de la projection, une technique utilisée par les conteurs itinérants sur l'Altiplano, et qui remonte à la période de l’Empire Inca. Le narrateur montre des photos des acteurs lors de sa présentation afin de familiariser davantage le public avec ce qui va être projeté sur l’écran (Jorge Sanjinés 1970, 12). Tout cela pour remédier à la différence entre le réel pertinent du réalisateur et la vision du monde des peuples natifs.
Conclusion
L'échec de Yawar Mallku à communiquer efficacement avec les natifs de Bolivie, à l’inverse de son succès extraordinaire auprès du public bolivien de la classe moyenne, suscite un gros remaniement de la pratique cinématographique chez Sanjinés et les autres membres du groupe Ukamau. Évidemment, l'utilisation unique du dialogue en aymara dans plusieurs de ces films (Ukamau, 1967) ou en quechua (Yawar Mallku, 1969) ne suffit pas à rendre les films capables de communiquer avec les destinataires. Cette question dominera la pratique cinématographique de Sanjinés dans la suite du XXème siècle, et est une thématique centrale dans la théorie qu’il propose. Là réside à mes yeux l’un des aspects les plus remarquables de sa pratique artistique. Ces réflexions donneront comme résultat des expériences comme El coraje del pueblo (Le courage du peuple, 1971) Los caminos de la muerte (Les chemins de la mort, film inachevé tourné en 1970) et Llosky Kaymanta ! (Dégagez d’ici ! en langue quechua, 1977).
On peut aussi y voir l’expression de son combat personnel le plus contradictoire : avoir la possibilité de faire du cinéma politique, donc le privilège d’une lecture pertinente du monde commun et du choix d’un combat, au contraire de ses personnages, qui n’ont pas la possibilité d’en faire autant car ils doivent correspondre à un type, une « figure générique » de natif qui vit dans une culture inamovible, qui possède une identité résistante à l’aliénation et qui est en syntonie naturelle avec son courant politique et les pratiques révolutionnaires.
Bibliographie
Barot, Emmanuel. Camera politica : dialectique du réalisme dans le cinéma politique et militant, 1re édition, Paris, Vrin, 2009.
Brenez, Nicole. Manifestations : écrits politiques sur le cinéma et autres arts filmiques, 1re édition, Cherbourg, De l’incidence éditeur, 2019.
Chiavenato, Julio José. La Guerra del Chaco. Petróleo, 1re édition, Asunción del Paraguay, C. Schauman Editor, 1989.
Fisbach, Erich. La Bolivie ou l’histoire chaotique d’un pays en quête de son histoire, 1re édition, Paris, Éd. du Temps, coll. Questions du civilisation, 2001.
Gamboa, Ariel. El cine de Jorge Sanjinés, 1re édition, Santa Cruz, Fundación para la educación y desarrollo de las artes y Media FEDAM, 1999.
Gumucio Dagrón, Alfonso. Historia del cine en Bolivia, 1re édition, La Paz, Los amigos del libro, 1982.
Gupta, Udayan. « Neo-realism in Bolivia : An Interview with Antonio Eguino », Cinéaste 9, no2, 1978, p. 27.
Salmon, Josefa. El futuro está detrás. Entrevista al cineasta Jorge Sanjinés, 1re édition, La Paz, Plural, 2020.
Sánchez-H, José. The art and politics of Bolivian cinema, 1re edition, Lanham, Md, The Scarecrow Press, Inc., 1999.
Sandoval Rodríguez, Issac. Historia de Bolivia. Desarrollo histórico social boliviano, 4e édition, La Paz, Ministerio de Trabajo, Empleo y Previsión Social, 2016.
Sanjinés, Javier. Mestizaje Upside-Down, 1re édition, Pittsburgh, Univ. of Pittsburgh Press, 2004.
Sanjinés, Jorge. Teoría y práctica de un cine junto al pueblo, Segunda edición, México, D.F., Siglo Veintiuno Editores, 1980.
Sanjinés, Jorge. « A Talk with Jorge Sanjinés », Cinéaste 4, no3, 1970, p. 12‑13.
Bailey, Alberto. « Yawar Mallku y las ratas », Presencia, éd. Presencia, août 1969.
Hoy, ed. « Cinematografía indígena, demagogía internacional », Hoy, août 1969.
Confederación Universitaria Boliviana y Federación Universitaria Local. « Prohibición a “Yawar Mallku” : Un crimen contra la cultura », Prensa libre, éd. Prensa libre, 20 juillet 1969, p. 4.
Confederación Universitaria Boliviana y Federación Universitaria Local « El gobierno de Torres pone fin a una década de sagaz intromisión del imperialismo. Expulsión del Cuerpo de Paz, satisfacción al honor Patrio. », Jornada, 23 mai 1971.
Espinal, Luis. «Yawar Mallku », Presencia, éd. Presencia, 17 juillet 1969.
Espinal, Luis. «Manifestación de reclamo por haber suspendido un película », Presencia, 18 juillet 1969.
Peña, Jorge. «Yawar Mallku », Prensa libre, 27 juillet 1969.
Peña, Jorge. « Prohibición Yawar Mallku », 18 juillet 1969.
Peña, Jorge. «‘Yawar Mallku’ triunfó en el Festival de Venecia », Prensa libre, 5 septembre 1969.
Films
BELLOT, Rodrigo. ¿Quién mató a la llamita blanca? (Qui a tué le petit lama blanc ?), Buena Onda Films, 2005.
Russo, Kiro. El Gran movimiento (Le grand Mouvement), Altamar Films, 2021
Russo, Kiro. Viejo Calavera, Socavón Cine, 2016
Sanjinés, Jorge. Ukamau (C’est ainsi), Grupo Ukamau, 1966.
Sanjinés, Jorge. Yawar Mallku (Le sang du condor), Grupo Ukamau, 1969.
Sanjinés, Jorge. El coraje del Pueblo (Le courage du peuple), Grupo Ukamau, 1971.
Sanjinés, Jorge. Llosky Kaymanta ! (Dégagez d’ici !) Grupo Ukamau, 1977.
Sanjinés, Jorge. La Nación Clandestina (La nation clandestine), Grupo Ukamau, 1989.
Valdivia, Jorge. Zona Sur (Zone sud), Cinenomada, 2009.
Tableau d’illustrations
Figure 1 - Affiche Officielle du film Yawar Mallku (1969)
Figure 2 - Photogramme séquence finale du film (Jorge Sanjinés 1969)
[1] Barot reprend le concept de « forme cinématographique de l'histoire » de Baecque (Barot 13). Baecque désigne le mode spécifique par lequel un film institue, apprend, construit et incarne le continent histoire.
[2] Le groupe Ukamau est un collectif d’artistes et techniciens du cinéma. Il fut fondé en 1968 par Jorge Sanjinés (réalisateur), Oscar Soria (scénariste), Antonio Eguino (chef opérateur) et Ricardo Rada (producteur). Dans les années 1990, il devient la Fondation Ukamau, dont la mission est de préserver l’œuvre cinématographique du groupe Ukamau, de prendre en charge sa diffusion auprès du public national et international et de soutenir la recherche, selon son site officiel : https://ukamau.org.bo.
[3] https://www.peacecorps.gov/
[4] Espinal écrit : « La trayectoria auténtica de este grupo de cineastas nacionales hay que apoyarla decididamente. En la Bolivia de hoy, éste es el único cine decente que se puede hacer; si no se quiere caer en el esteticismo inerte o en el puro comercio. »
[5] Version originale: «La anti-cultura ha sido traducida en un hecho que debe llena de vergüenza a propios y extraños ; el atentado ha sido consumado y el país se ha visto envuelto en los ignorantes trajines de un ‘Censura’ que prefiere prohibir una producción nacional que, en el caso presente, es un vehículo de conocimiento de la realidad boliviana. »
[6] Version originale: «… los universitarios que no pierden oportunidad alguna para dar vitores al ‘Che’ (…) las gloriosas minifalderas que han pedido la renuncia del Alcalde (…) y los Beatles de Churubamba..»
[7] La guerre du Football est un conflit qui opposa le Salvador et le Honduras en juillet 1969, même si le football n’a été que le catalyseur et non la cause profonde de cette guerre. Elle est également connue sous le nom de guerre des Cent Heures.
[8] Versión originale : « …como a animales para determinarnos y ‘ayudarnos’. »
[9] A titre d’exemple, et juste pour citer les plus récents, nous trouvons les deux films long métrages de Kiro Russo, Viejo calavera (2016) et El Gran Movimiento (2021), ainsi que Zona Sur (2009), de Jorge Valdivia et même un film d’humeur, ¿Quién mató a la llamita blanca? (2005), de Rodrigo Bellot.
[anon1]Demander à l'auteur de vérifier si ce qui a été ajouté en jaune est correct